Bloc opératoire et risque infectieux
Les dysfonctionnements au niveau des comportements du personnel, de la circulation des personnes, des patients, du matériel et des déchets peuvent être à l’origine d’infections nosocomiales.
Infections du site opératoire (ISO)
Malgré l’évolution considérable de la technique opératoire et de l’anesthésie, et l’utilisation d’antibiotiques prophylactiques, les données récentes de surveillance des infections du site opératoire (ISO) révèlent une incidence en Suisse d'environ 5,6% ce qui représente en plus de la mortalité (estimée à 738 décès par an en Suisse) et de la morbidité qu’elles engendrent, un surcout direct moyen par cas de 6’000 à 13’000 CHF (voir surveillance épidémiologique des infections du site opératoire - http://www.swissnoso.ch/wp-content/uploads/2009/05/f_workshop-sn-lausanne-07-05-20091.pdf).
Le risque de survenue d’une ISO dépend de multiples facteurs liés à l’acte chirurgical lui même (préparation cutanée de l’opéré, type et classe de chirurgie, durée de l’intervention, choix et timing de l’antibioprophylaxie…), aux caractéristiques du patient opéré (âge, facteurs de risque, maladies sous-jacentes…) et à l’environnement général dans lequel l’acte est pratiqué (organisation du bloc opératoire, maîtrise de la qualité de l’air et de l’entretien des locaux, etc…).
La majorité des infections du site opératoire ont pour origine la flore du patient, plus rarement la flore des professionnels (germes présents sur les mains ou dans la sphère ORL), la flore environnementale, exceptionnellement une contamination hématogène d’un autre foyer infectieux.
Prévention du risque infectieux
Mesures pour prévenir les ISO
Les mesures préventives les plus importantes pour réduire le taux d’infection au niveau du bloc opératoire ont pour but, d’une part de réduire la charge bactérienne au niveau du champ opératoire, par une désinfection rigoureuse des mains et du site d’incision et par l’administration prophylactique d’antibiotique, d’autre part de réduire le nombre de particules infectieuses en suspension dans l’air. Ce dernier but peut être atteint par la combinaison de plusieurs mesures : une ventilation adéquate, la limitation du nombre de personnes en salle, la limitation des allées et venues pour éviter des ouvertures de portes inutiles, ainsi que la limitation des discussions inutiles et une tenue propre non perméable.
Facteurs liés aux patients et à la chirurgie
Le risque d’infection du site opératoire dépend de l’état pré opératoire du patient (score ASA).Ce score, allant de 1 à 5, est un bon indicateur de la probabilité de mortalité péri-opératoire globale. S’il est supérieur ou égal à 3, il est considéré comme un facteur de risque pour les ISO. L’hygiène de base ainsi que l’état cardiovasculaire, la température, la glycémie et l’état d’oxygénation du patient ont également une influence non négligeable sur la survenue des ISO.
Le risque intrinsèque de la plaie sur la survenue d’une ISO est basé sur le degré de contamination de la plaie. La classification d’Altemeier permet de répartir les interventions chirurgicales selon le risque de contamination du site opératoire.D’autres facteurs liés à l’intervention peuvent influencer sur la survenue des ISO:
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Préparation cutanée du champ opératoire
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Durée de l’intervention
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Planification de l’intervention (programmée ou en urgence)
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Conditions environnementales en salle d’opération (température, équipements, qualité de l’air, …)
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Niveau d’expérience de l’équipe chirurgicale
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Antibioprophylaxie per opératoire
Facteurs extrinsèques au patient
Tenue et comportement des professionnels travaillant au bloc opératoire
Outre les infections du site opératoire, d’autres infections nosocomiales peuvent survenir chez le patient opéré, en particulier des infections de cathéters ou des infections urinaires sur sonde. Tous les intervenants, en particulier l’équipe d’anesthésie responsable entre autre de la pose des cathéters veineux et périduraux, sont donc concernés par les mesures préventives recommandées.
Entretien de l'environnement
Plusieurs éléments tels l’organisation/architecture des locaux, les systèmes de ventilation, la tenue vestimentaire et l’activité humaine jouent un rôle non négligeable sur la qualité microbiologique de l'environnement du bloc opératoire
L’entretien des locaux du bloc opératoire poursuit deux objectifs :
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assurer un état de propreté conforme aux recommandations d’hygiène pour ce type de local (classification des locaux hospitaliers en zone à risque)
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maîtriser la biocontamination dans l’enceinte du bloc opératoire et plus spécifiquement en salle d’intervention
La qualité de l’air dans l’enceinte peut être à l’origine d’infections si le système est mal conçu, mal entretenu ou son fonctionnement perturbé (portes ouvertes, va et vient intempestifs en salle d’intervention, ….)
La maîtrise de la contamination de l’environnement par manuportage et aérotransmission de particules (souvent d’origine humaine) contribue à la prévention du risque infectieux au bloc opératoire bien que la part prise par la contamination des surfaces dans la genèse des infections du site opératoire soit difficile à apprécier.
Cependant, des surfaces hautement contaminées exposent à des risques de transmission manuportée et de remise en suspension de particules potentiellement contaminantes au cours d’une intervention.
A fin de favoriser une bio décontamination optimale de l’environnement, l’entretien des différents locaux du bloc opératoire doit être planifié et effectué selon des procédures qui tiennent compte du risque infectieux du local (fréquence de nettoyage).
Le personnel qui effectue ces entretiens doit être au bénéfice d’une formation spécifique.
Les matériaux utilisés pour les revêtements horizontaux et verticaux doivent être choisis de manière à optimiser le nettoyage (lisses, sans aspérités ni saillies, avec le moins de joints possibles et résistants aux produits nettoyants – désinfectants utilisés)
L’encombrement des salles d’opération (équipements médicaux, meubles de stockage, ….) représente une entrave à un entretien optimal de ces locaux
Qualité de l'air
Le risque d’infection du site opératoire est influencé, entre autres, par les facteurs de risque du patient (âge, pathologie sous jacente), le type d’intervention et la durée de l’intervention.
Le risque de contamination aéroportée du site opératoire diffère selon le type d’intervention. La qualité de l’air en salle d’opération joue un rôle non négligeable lors d’interventions avec mise en place d’implants (prothèse de hanche, de genoux, valves cardiaques). A l’opposé, l’impact de la qualité de l’air sur la survenue d’infections du site opératoire sera moindre lors d’opérations sur des régions anatomiquement déjà contaminées. Il en résulte que, pour des interventions avec mise en place d’implants des effets de protection escomptés du système de ventilation sera supérieur à celui des opérations sur le tractus digestif.
Il ne faut, cependant pas oublié qu’à l’exception des opérations avec mise en place d’implants, la qualité de l’air en salle d’opération n’a un impact que très marginal sur la survenue des infections du site opératoire. L’impact de l’antibioprophylaxie pré opératoire, de la tenue des professionnels, de la désinfection du site opératoire, de la discipline des personnes qui travaillent au bloc opératoire y est beaucoup plus déterminant.
La prévention des ISO passe par l’application de nombreuses recommandations qui ciblent l’opéré, le personnel, l’environnement opératoire. La qualité de l’air au bloc opératoire faisant l’objet d’une directive émise par des experts (SICC), seules les mesures de contrôle sont abordées dans nos recommandations.